Où ils fuirent l’hiver

Chine - Janvier 2016

Hong-Kong. Deux mots, comme un coup de tambour. La cadence d’une mégalopole qui ne dort jamais. Des millions de passants qui traversent de larges avenues au rythme du ballet des feux tricolores. Hong-Kong. Des sonorités exotiques qui entraînent vers l’Orient. D’élégants idéogrammes mandarins drapés de couleurs luminescentes suspendus aux façades d’immenses gratte-ciels. Hong-Kong. Un parfum de bout du monde. Des effluves échappés de bols de nouilles fumants qui se répandent à travers les ruelles étroites. Hong-Kong de mes songes, voyage rêvé.

A la descente du train, après une journée et une nuit de voyage ensommeillé à travers les plaines chinoises, c’est un peu la douche froide. Le ciel est gris, la température ne dépasse pas les 10°C, et il pleut par intermittences. D’interminables escalators, les plus longs du monde, nous hissent lentement vers les hauteurs de la ville, toujours plus près des nuages lourds. En haut nous attend Shirley, jeune américaine installée à Hong Kong qui nous offre l’hospitalité alors que l’on s’imaginait déjà passer nos nuits dans une chambre sordide louée à prix d’or. Chez elle, nous retrouvons la chaleur d’un foyer et partageons un coin de canapé avec Kamal, un aventurier australien aux milles histoires de voyage.

Au fil de nos promenades à travers la ville, Hong Kong se révèle être un joyeux mélange de ce que les mégapoles internationales ont de plus emblématique, dans un cadre exceptionnel. Prenez les rues escarpées de San Francisco, les bus à double étage londoniens, les gratte-ciel et les enseignes lumineuses de New York. Ajoutez les échoppes d’apothicaires de Pékin, et mettez-y la population cosmopolite de Singapour. Prenez de la hauteur, et visualisez le tout entouré de la baie de Sydney, parsemée de quelques-îles presque vierges couvertes de forêt tropicale. Vous obtenez un ensemble futuriste, parfois chaotique, et absolument fascinant.

Hong Kong rassemble mille mondes en un.

Des petites îles habitées par des familles de pêcheurs aux restaurants gastronomiques situées au 34ème étage d’immeubles ultra-modernes, des temples richement décorés aux boutiques de design épuré, Hong Kong rassemble mille mondes en un et bouillonne d’une histoire au carrefour d’influences asiatiques et occidentales.

C’est à Hong-Kong aussi que nous vivons une de nos expériences gastronomiques les plus mémorables. Pour marquer notre première soirée dans la ville, Shirley nous a donné rendez-vous pour dîner. A l’approche de l’heure convenue, munis d’une adresse énigmatique, nous pénétrons dans un grand bâtiment un peu lugubre, qui se révèle être un marché couvert, de prime abord vide et silencieux en cette fin de journée. Des escaliers nous mènent au troisième et dernier niveau, où nous découvrons avec surprise des groupes d’amis joyeusement installés autour de tables réparties sur toute la surface de l’étage.

L’enthousiasme des tablées tranche avec l’incongruité du lieu, sorte de grand hangar aux murs carrelés et dont le sol porte encore les traces du marché qui s’est tenu quelques heures auparavant. Nous prenons place autour d’une table ronde où Kamal, Shirley et plusieurs de ses amis nous attendent déjà. Au programme, un « hot pot », sorte de fondue à la chinoise, très prisé à Hong Kong. Le principe est simple : une ou plusieurs marmites de bouillon brûlant sont installées au centre de la table, et chacun y plonge à loisir divers ingrédients qui y seront cuits.

Kim, amie de Shirley, et malaysienne expatriée à Hong Kong, nous met en garde : sur les trois bouillons placés devant nous, l’un n’est pas épicé, un autre est légèrement relevé, et le troisième est très piquant. Touchée de voir qu’ils ont pensé à nos fragiles palais d’occidentaux, je plonge avec confiance un champignon dans le bouillon non-épicé, que je récupère agilement quelques minutes plus tard pour l’enfourner sans crainte dans ma bouche. Il me faut quelques secondes pour réaliser avec douleur que si le bouillon était considéré zéro sur l’échelle de l’épice, c’est que nous n’avons vraisemblablement pas la même échelle.

La bouche en proie à des brulures à la limite du supportable, et ma foi en Kim sérieusement émoussée, j’hésite plusieurs secondes lorsqu’elle nous demande si on lui fait confiance pour la commande des plats. Prenant mon silence pour une approbation, elle se lance dans une longue énumération en chinois au serveur qui prend note consciencieusement.

Quelques minutes plus tard arrivent alors sur la table les plats destinés à être plongés dans les bouillons brûlants, qui se révèlent être un véritable festival des spécialités chinoises les plus incongrues : langue de canard (répugnant), pattes de poulet (immangeable), intestins de porc (nauséabond). Partagée entre mon dégoût et la peur de vexer mes hôtes, j’alterne entre des refus polis, des crachats sous la table pour les chats errants, et des glissements latéraux vers l’assiette de Mimi à qui les intestins de porc rappellent avec délice les andouillettes AAAAA qui lui manquent tant.

Fort heureusement, la richesse de la gastronomie Hong-Kongaise nous permettra de nous venger sur les soupes de nouilles délicatement parfumées, les sushis fraichement préparés, les dim sum –sortes de raviolis- aux milles parfums.

Nous quittons Hong Kong après une semaine riche en découvertes, sous le charme de cette métropole futuriste au cœur de la jungle, et nous promettons d’y revenir.

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Voilier Le 10 décembre 2016

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Le 15 janvier 2024

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